Limoges ABC en Limousin

Huit partenaires, huit métiers, huit souffrances, autant d’espoirs

La crise sanitaire, toujours et encore. Sans échéance, sans perspective fiable et sereine. Notre économie est en berne et nos partenaires souffrent. Des commerces fermés, des entreprises sans production, des services sans personnel, les chefs d’entreprises sont très inquiets. Certains veulent tellement imaginer une sortie de crise, mais quand ? Et comment allier sécurité des personnes et productivité ? Nous continuons notre tour des partenaires par huit d’entre eux, de secteurs tous différents mais tous directement impactés, fermés depuis plus de cinq semaines. 

 

Samia Riffaud. Enjeu formation, deux coaches pour former 49 coiffeuses

« Je ne rouvrirai mes salons que si je suis vraiment prête et que ma profession a l’air prête ». Samia Riffaud gère 49 personnes et ses salons de coiffure Coiff & Co’ sont, comme tous les salons de France, fermés depuis le 15 mars. Pourtant la reprise d’activités inquiète la cheffe d’entreprise. « Comment travailler avec un masque dans un salon de coiffure ? Comment assurer la protection des client(e)s ? Comment anticiper l’accueil et la relation client ? ». Samia Riffaud cherche les solutions. Achat de masques et de visières, partenariat pour le gel … et puis (intéressant) la formation comme sortie de crise. « J’ai pensé à la reprise. Il va falloir tenir le choc lorsque toute la journée les clients ne parleront que de ça, du virus, des malades, des proches … Il faudra être préparé à entendre ces discours toute la journée ! C’est un boulot énorme ». Samia a donc sollicité deux coachs pour former ses 49 salariés. Dès cette semaine sur Zoom, les coiffeuses vont apprendre à gérer une nouvelle relation client, communication de crise. « Notre modèle économique est remis en question. Notre responsabilité et notre image sont trop importantes. ».

Benoit Raggazini. Une auto-école fermait déjà chaque semaine en France

Mêmes problèmes à gérer pour Benoit Raggazini avec Accès Conduite. « Nous étions déjà dans une période compliquée avec l’irruption d’auto-entrepreneurs qui travaillent avec des plates-formes en ligne … et des taux de réussite ridicules. Une auto-école fermait déjà chaque semaine en France depuis un an. » La crise sanitaire, c’est non seulement une perte sèche pour la profession mais c’est aussi beaucoup d’incertitudes sur l’avenir. « Comment peut-on gérer les zones barrières dans un véhicule ? Admettons que nous trouvions des solutions, il va falloir rapidement rattraper les heures perdues, effectuer des heures supplémentaires, diminuer les charges, gérer la trésorerie et les emprunts. » Beaucoup d’incertitudes.

Philippe Dauby. Les garages sous pression, les ventes en interrogation

Philippe Dauby se projette dans le monde de demain, lorsque les clients reviendront dans les garages pour acheter, louer, faire réparer les véhicules. « Pour l’instant, j’ai un mécanicien à temps plein à Nantiat et deux carrossiers vont revenir cette semaine. A Limoges, deux responsables d’ateliers viennent quelques demi-journées et on organise un mini planning de secrétariat. » Le patron du Garage de la D2000 est dans l’inconnu, même s’il avoue qu’il devrait passer le cap. « Cependant, combien de temps va-t-il falloir pour retrouver notre niveau d’activité antérieur. A commencer par la vente de voitures. Le jour où mes vendeurs vont reprendre, les ventes ne vont pas repartir tout de suite, c’est certain, mais il faudra bien payer les salaires … ». En attendant, Philippe Dauby a acheté du gel chez Solibio, des visières plexi chez Starplast et va passer une commande de masques. La reprise et ses surprises, les meilleures ou pas …

François Roulière. L’hôtellerie, risque sanitaire, risque économique

Autre métier particulièrement touché par la crise sanitaire, l’hôtellerie. Les deux hôtels de François Roulière sont aujourd’hui fermés, comme ceux de ses collègues. Les Etablissements Recevant du Public (ERP) sont considérés comme étant des lieux à risque dans la propagation du virus. La crise frappe fort. « Elle est catastrophique pour les petites entreprises. On peut prendre des mesures de chômage partiel et aller chercher des prêts garantis, des dépôts de bilan seront néanmoins inévitables. » nous confie le patron du Richelieu et administrateur Best Western. L’hôtellerie est en souffrance. Et aucune perspective n’est affichée pour l’instant. « En plus, il est vivement conseillé de mettre en place une garde de nuit pour éviter les problèmes. On ne va pas se retrouver en dépôt de bilan ; mais c’est compliqué. »

Marie-José Audouin Jeannin. “Il va falloir se recentrer sur le local”

En souffrance comme les Agences immobilières. Marie-José Audoin Jeannin gère Century 21 AAI Immobilier à Limoges. Partenaire du Limoges ABC, optimiste revendiquée, l’énergique MJJ développe ses réseaux de solidarité. « J’ai actionné tous les leviers pour créer une chaîne de solidarité dans mon voisinage. Aussi bien avec mes voisins que je ravitaille pour regrouper les achats qu’avec les commerçants, La Mie Câline, Les Halles centrales, les bouchers, les chocolatiers. On choisit un service ou un prix ? Il faut nous recentrer sur le local, faire travailler les gens d’à côté. Notre réseau Century 21 est d’ailleurs partenaire de l’opération “J’aime mon bistro” qui soutient l’activité des cafés – hôtels – restaurants ! » Côté pro, l’agence est fermée depuis le mardi 17 mars. « On continue à appeler les clients pour maintenir le lien. En cas d’urgence, les artisans interviennent dans les logements tout en se mettant en sécurité totale par rapport au client. L’activité est arrêtée mais pas la réception des appels et des messages. Nous gérons la proximité et l’urgence. Mais on ne peut pas effectuer les sorties des logements. D’ailleurs, sauf urgence, les déménagements sont interdits. ».

Pierre-François Dobbels. “Et si notre qualité de vie devenait un atout”

De l’agence au financeur des prêts, il n’y a qu’un pas. Pierre-François Dobbels et Nicolas Paul gèrent NPF Courtage, courtier en crédit immobilier. En l’absence de transaction immobilière, l’activité est très réduite … « Nous avons un décalage de quatre à six semaines entre la signature du compromis et le financement. Grâce à notre processus sécurisé de signature électronique, nous avons pu concrétiser avec les banques les affaires signées début mars. Tous les dossiers déjà en cours continuent bien évidemment d’être suivis à distance. » Pierre-François Dobbels veut positiver la sortie du confinement : « Peut-être avons-nous, ici dans notre région, une carte à jouer. Les nouveaux modes de travail et notre qualité de vie ne peuvent-ils pas devenir de véritables atouts pour l’immobilier ? » Les deux chefs d’entreprise gèrent la crise et le télétravail à ses charmes. « Nous sommes aussi devenus de vrais baby sitter, sans sommation non plus ! ».

Roland Samie. La porcelaine, patrimoine en souffrance

Ses quatorze établissements sont fermés. Roland Samie n’a rien perdu de sa faconde mais il commence à s’inquiéter. Le patron de MP Samie à Saint-Yrieix ne vend plus et il attend beaucoup des relais de trésorerie qu’il a sollicité. « Il y a dix ans, les affaires étaient au beau fixe. On avait une trésorerie qui nous permettait de voir venir. Aujourd’hui, il faut se battre dix fois plus. Avec la crise, les métiers de bouche sont à l’arrêt. Et nous, on vend des assiettes pour mettre des aliments dedans. J’ai des palettes qui sont parties et … qui sont revenues. Je devais ouvrir un établissement à Vichy le 21 mars. Pour l’instant, mes quarante salariés sont au chômage ! ». La porcelaine, patrimoine en souffrance.

Laurent Communeau. “Ceux qui s’en sortiront sont ceux qui sauront s’adapter”

Et puis, il y a celles et ceux qui travaillent. Laurent Communeau et ses deux magasins La Mie Câline de Limoges (Place de la Motte et Jean-Jaurès) n’a pas fermé. La boulangerie – et traiteur – fait partie de ces commerces essentiels qui doivent être ouverts. Mais Laurent Communeau, acteur engagé dans le tissu local, n’est pourtant pas très optimiste. « Nous sommes ouverts mais avec une réalisation de seulement 20% de notre chiffre d’affaires. Il n’y a personne en ville, les entreprises et les administrations sont fermées. La grande majorité du personnel est en chômage technique et je vous avoue que j’étais très inquiet jusqu’à l’acceptation de notre dossier. Notre situation est telle que nous sommes complétement dépendants de ces mesures. Et puis, il y a aura des dommages collatéraux. Ceux qui s’en sortiront seront ceux qui observeront et sauront s’adapter. » Laurent Communeau prépare la reprise et imagine de nouveaux modèles de développement : « Il faudra intégrer nos équipes, penser communication et action commerciale, se préparer à des changements de consommation et probablement une reprise lente et longue. ». Tout en actionnant des leviers avec les professionnels et les chambres consulaires, il n’oublie pas la solidarité avec les “premières lignes”, les personnels soignants des urgences, le commissariat. « Nous leur avons livré des produits traiteurs. Dans cette situation de crise, il faut aussi savoir donner. »

Merci à toutes et tous et nous vous souhaitons le meilleur, autant que faire se pourra

21 avril 2020